Interview du Professeur Annemans sur l’importance de nos relations sociales

5 juillet 2018

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« La lutte contre la solitude doit devenir une priorité lors des prochaines élections communales »

À quel point les Belges sont-ils heureux? Qu’est-ce qui fait notre bonheur ou le détruit? Grâce à l’Enquête nationale du Bonheur, menée par l’UGent, nous apprendrons, cette année, ce qui nous rend heureux, et comment nous pouvons être (encore) plus heureux. Le professeur du bonheur Lieven Annemans, titulaire de la chaire NN, prend à chaque fois comme point de départ les domaines spécifiques de la vie qui définissent le bonheur des Belges. En plus d’une bonne santé et d’une situation financière stable, la solitude et la qualité de nos relations sociales influencent aussi grandement notre bonheur.

Professor Annemans, à quel point les Belges se sentent-ils seuls aujourd’hui?
L’Enquête nationale du Bonheur montre que presque la moitié (46%) des Belges éprouvent un sentiment de solitude, avec une fréquence allant de « parfois » à « toujours ». Nous avons constaté que ce sont principalement les jeunes adultes de moins de 34 ans et la génération X (35 à 50 ans) qui se sentent seuls. La majorité des Belges de 20 à 50 ans éprouvent un sentiment de solitude, que ce soit occasionnellement ou toujours. Ces chiffres frappants demandent une réaction. La solitude multiplie par quatre le risque d’être malheureux et pèse donc lourdement sur notre bonheur national brut.
Les nouveaux chiffres confirment que le bonheur des Belges varie également selon les générations. Les séniors sont les plus heureux, même s’il reste encore beaucoup de choses à faire pour rendre les personnes de cette génération en moyenne plus heureuses. Savoir pourquoi la génération Y se sent la plus seule, me semble une question intéressante pour les sociologues.

Ces chiffres frappants demandent une réaction. La solitude multiplie par quatre le risque d’être malheureux et pèse donc lourdement sur notre bonheur national brut.

Comment pouvons-nous lutter contre la solitude en Belgique?
Il se révèle primordial d’investir dans la lutte contre la solitude et de nouer des relations de qualité. Comme nous l’avons déjà mentionné, nous pouvons nous en charger nous-mêmes, mais le monde politique a également un rôle important à jouer. Au Royaume-Uni, on a récemment nommé un Ministre de la Solitude. C’est un signal clair. Selon moi, les niveaux d’administration locaux en Belgique sont les plus proches des citoyens et peuvent faire la différence. Je souhaite donc appeler les pouvoirs politiques locaux, guidés par leurs présidents de partis au niveau national, à faire de ce sujet une priorité pour les prochaines élections. Il est crucial pour notre bonheur national que les autorités locales investissent dans des activités sociales et culturelles, qui permettent aux individus de se réunir, et que le bénévolat soit encouragé. Aujourd’hui, nous constatons, bien trop souvent, que les investissements destinés à de telles activités sont remis en cause.

Au Royaume-Uni, on a récemment nommé un Ministre de la Solitude. C’est un signal clair. Selon moi, les niveaux d’administration locaux en Belgique sont les plus proches des citoyens et peuvent faire la différence.

Quels sont les facteurs qui font que les individus se sentent plus vite seuls?
Il est primordial de créer et de maintenir de bonnes relations avec les personnes qui font partie de notre vie privée. À cet égard, notre partenaire, nos amis et notre famille occupent donc une place extrêmement importante. Ainsi, la qualité des relations avec notre partenaire se révèle décisive pour notre bonheur. Nous avons jusqu’à cinq fois plus de chance d’être heureux quand nous sommes satisfaits de nos relations avec notre partenaire. Bien sûr, pour beaucoup d’entre nous, travailler à une relation est plus facile à dire qu’à faire. Mais c’est possible, et cela passe par une plus grande attention portée à autrui.

Nous avons jusqu’à cinq fois plus de chance d’être heureux quand nous sommes satisfaits de nos relations avec notre partenaire.

Outre ces relations, notre santé et nos revenus exercent aussi une influence. Une mauvaise condition physique peut nous plonger dans l’isolement et provoquer un sentiment de solitude. À partir d’un revenu familial de moins de € 2.500 par mois, on remarque déjà des chances moindres de maintenir de bonnes relations.

Comment pouvons-nous améliorer la qualité de nos relations?
Nous pouvons nous occuper des autres, chaque mois. En faisant du baby-sitting ou du bénévolat par exemple, nos chances d’être heureux augmentent de 44%. Grâce à ces activités, nous nous sentons également utiles et moins seuls. Afin d’améliorer la qualité de nos relations, il importe d’y consacrer du temps, que ces relations concernent notre partenaire, notre famille, nos amis ou nos voisins.

Graphique: Impact des différentes activités sur les chances de bonheur

Quel impact les réseaux sociaux ont-ils sur notre bonheur?
Nous avons examiné si l’utilisation active des réseaux sociaux nous rendait plus heureux, mais nous avons observé qu’ils n’ont pas beaucoup d’impact sur notre bonheur. L’enquête montre que les sorties, les rencontres avec des amis, les activités de bénévolat ou dans la nature accroissent toutes notre bonheur. Nous en concluons que rien ne peut remplacer les vrais contacts interpersonnels et physiques, et certainement pas les réseaux sociaux.

Nous en concluons que rien ne peut remplacer les vrais contacts interpersonnels et physiques, et certainement pas les réseaux sociaux.

Pour en savoir plus sur les résultats de l’Enquête nationale du Bonheur à propos des relations sociales, consultez ici le dossier de presse.